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18Mai/16Off

En guerre contre qui ?

"Groupe terroriste", se revendiquant "Califat", et reposant sur une vision "extrême" de l'islam sunnite... Difficile de définir une organisation qui se distingue par une stratégie sans précédent... Premier épisode d'une série pour mieux comprendre un ovni du terrorisme. D'emblée, l'auteur souligne que toutes les informations figurant dans cette étude sont vérifiées, vérifiables et disponibles. L'originalité de l'exercice tient aux étonnements et questionnements qu'on trouve ici - mais quasiment nulle part ailleurs, médias et politiciens étant hypnotisés par les égorgements et autres actes iconoclastes, au point d'oublier tout le reste. A l'œuvre aujourd'hui - dans quel fracas médiatique - l'entité de "partisans globaux", au choix nommée "Etat islamique" (ci-après EI), "Etat islamique en Irak et au Levant", ISIS, ISIL "Daech" ou "les Takfiri". Cette étude vise à montrer que, si nous subissons au quotidien les récits des horreurs perpétrées par cette entité ; si l'on nous menace de l'irruption en Europe de milliers de ses sanguinaires moujahidine et qu'on nous gave de chiffres effarants sur son arsenal et la taille de ses "armées" - nul n'aborde jamais l'essentiel : qu'est-ce que "l'Etat islamique" ? Quelle est sa nature ? Son essence ? Début septembre 2015 encore, Le Figaro s'inquiète : "Un an de bombardement n'a pas ébranlé l'Etat islamique" ; "En échec face à Daech, les Occidentaux s'interrogent sur leur stratégie". Qu'est-ce donc alors que cet inébranlable EI, qui affronte le monde entier ? Et pourquoi les Occidentaux s'interrogent-ils sur leur propre stratégie, et non sur ce qu'est ce désormais formidable ennemi, dont nul ne savait même le nom voici trois ans, hormis de rares experts ? Tentons d'y voir clair et comparons l'EI au Hezbollah. Ce qu'est le Hezbollah est enfantin à décrire : entité paramilitaire, ou milice chi'ite du Liban, à fort tropisme terroriste ; équipée, entraînée et manipulée par les forces spéciales de la République islamique d'Iran. Deux lignes : on sait l'essentiel. Or ainsi définir l'EI est impossible car, allons droit au but, l'EI ne va pas de soi : c'est ce que nous établirons ici. Etonnons-nous d'abord de ce que nul, apparemment, ne remarque : L'EI est-il un "groupe terroriste" ? Non : nul groupe terroriste présent ou passé n'a jamais possédé plus de chars d'assaut que l'armée française ; en outre, depuis que l'E.I. sévit en Irak, on compte dans ce pays moins d'attentats terroristes qu'auparavant. Sur le terrain enfin, les succès de l'EI sont clairement de nature militaire et non terroriste. Qui plus est, l'EI opère au Moyen-Orient et s'il y a bien une règle sans exception dans la région, c'est que toute entité terroriste un peu durable y devient fatalement l'acteur d'un terrorisme d'Etat. Cette règle prédomine depuis cinquante ans - Abou Nidal (Fatah-Conseil révolutionnaire), Syrie puis Libye ; Ahmed Jibril (FPLP-Commandement général), Syrie ; l'Asala, Syrie ; le Hezbollah lui-même (Iran), en sont la convaincante démonstration. Mais alors, quel marionnettiste pour l'EI ? Au cours de l'année 2014, les pétromonarchies de la péninsule arabe et la Turquie ont soudain changé de protégés sur le champ de bataille Irak-Syrie pour aujourd'hui soutenir divers rejetons régionaux d'al-Qaida : Jabhat al-Nosra (al-Qaida en Syrie) et "al-Qaida dans la péninsule arabe" ; les premiers combattent l'armée de Bachar al-Assad allié de Téhéran, et le Hezbollah ; les seconds, les Houthis du Yémen, issus eux aussi de la constellation chi'ite. Ainsi tout est clair - sauf de savoir qui entretient l'E.I depuis que les principaux acteurs sunnites régionaux ont changé leur fusil d'épaule. L'EI est-il une guérilla ? Encore moins ; contrairement aux règles les plus éprouvées de la "petite guerre", l'EI ne se replie pas après l'attaque, mais s'enracine, contrôle durablement des territoires ; affronte des armées régulières. A notre connaissance, cette stratégie est sans précédent. L'EI se veut un "califat" : étrange, car toutes les références coraniques sunnites sérieuses affirment qu'un califat, c'est obligatoirement un territoire physique. Impossible d'imaginer un califat spirituel, clandestin, numérique ou métaphysique. Or l'allégeance se faisant indissociablement califat et au calife, si le territoire de l'Etat islamique est conquis par quelque ennemi, tous ces liens d'allégeance sont dissous : sur le champ, l'EI tombe en poussière - comme Dracula à la fin d'un film de la Hammer. L'EI prône-t-il une forme extrême de l'islam sunnite ? Là, énorme mystère - dans une affaire qui n'en manque pas. Dans l'islam sunnite, l'autorité suprême est al-Azhar, mosquée du Caire, centre d'enseignement spirituel et doctrinal tout ensemble. Modèle de prudence et de pondération, al-Azhar condamne par exemple "le terrorisme" en général, islamique ou autre, dans un flou étudié et de loin. En 2010, le secrétaire général du Conseil de la recherche islamique d'al-Azhar s'est ainsi borné à certifier la savante fatwa (600 pages) du Dr. Muhammad Tahir ul-Qadri (soufi pakistanais) qui rejette le terrorisme comme anti-islamique, voilà tout. Mais jamais al-Azhar - la mosquée, voire l'un de ses dirigeants à titre individuel - ne prononce de nom, ne désigne une organisation. Sur Oussama ben Laden par exemple, ou al-Qaïda : silence, même après le 11 septembre 2001. En décembre 2014 encore, al-Azhar refuse de qualifier l'EI de "groupe apostat" - sentence de mort qu'elle n'a jamais prononcée depuis sa fondation. Mais en février 2015, revirement brutal : le "cheikh al-Azhar", chef suprême de l'institution, tonne contre l'EI, ces "oppresseurs et corrompus qui combattent Dieu" et appelle à "crucifier et démembrer les terroristes d'ISIS".

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18Mai/16Off

L’idée de la liberté

L'idée de liberté pourra être introduite comme un moyen terme entre le phénomène et le noumène. L'idée de liberté étant en même temps une puissance, par cette idée l'homme est en possession actuelle de sa raison, qui descend alors, en quelque sorte, dans la série des phénomènes; par cette idée la «raison» est en même temps «nature». Il n'y a pas d'un côté le sensus sans l'intellectus, et de l'autre l'intellectus sans le sensus: les deux mondes, intelligible et sensible, semblent coïncider dans la conscience que l'être raisonnable a de lui-même et de son pouvoir, dans son idée active de l'activité même. Tout, dans le mensonge, «est expliqué et déterminé par les antécédents du menteur»,—dit Kant; mais dans ces antécédents mêmes, ajouterons-nous, il faut compter l'idée de la liberté et l'action motrice de cette idée, dont l'intervention peut suspendre ou faire dévier le cours antérieur des causes naturelles. Pour prédire les actions par leurs conditions phénoménales, il faut donc aussi calculer l'intensité de cette idée. Si le tort des naturalistes est de ne pas voir que, parmi les forces naturelles, se trouve l'idée de liberté, le vrai tort des idéalistes n'est pas de croire à la puissance des idées, mais au contraire de n'y pas croire encore suffisamment. En refusant à l'idée de liberté la puissance de produire un effet de plus en plus conforme à elle-même, de se réaliser au moins partiellement et progressivement comme les autres idées, ils s'arrêtent à moitié chemin dans leur idéalisme. Kant a admirablement défini la volonté en l'appelant: la propriété d'être cause par ses idées de la réalité des objets de ces idées mêmes. Dans cette définition, il semble avoir en vue la puissance déterminante des idées, qui réalisent leurs objets dans la conduite. Allons jusqu'au bout de cette définition et nous pourrons dire aux idéalistes:—Puisque j'ai, selon vous, la propriété de produire par mes idées les objets de ces idées, je dois avoir la propriété de produire, par l'idée subjective de ma puissance libre, la réalité au moins partielle de cette puissance même. Donc, du déterminisme la liberté tend à surgir; donc, de votre point de départ subjectif il n'est pas absolument impossible de passer à un effet objectif; donc, de ce que vous appelez la raison sort la volonté, et c'est surtout en ce sens qu'on peut parler avec Kant d'une raison pratique par elle-même.

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